Philosophie
La meilleure part du Temps - Suivi de De l’Église comme scandale
Guillaume Sire« Le Temps est-il un fleuve, jamais deux fois le même : un cours d’eau impossible à remonter ? Une prison ? Un dieu tueur, ou bien, comme disait Kant, une forme pure de l’intuition sensible ? Etsi c’était le sceau d’une promesse secrète ? S’il s’agissait non pas de ce qui passe, sépare et emporte, mais au contraire de ce qui retient, rassemble et supporte ? Pour écrire ce livre, j’ai œuvré comme ces inspecteurs de police qui épinglent à leur liège les éléments du dossier : la photo d’une arme, un rapport, un numéro de téléphone, un article de journal, etc. En changeant de rythme et en éclatant le propos, j’ai d’abord procédé par réfraction avant de concentrer les rayons attrapés ici et là vers un même point qui se trouve être à la fois l’origine et la destination du Temps... »
A seize ans j’étais fier, malin et prompt au jugement. J’étais romantique aussi, obsédé par tout ce qui, dans mon cœur, résistait: une faille dans le langage, certains décalages dans la conscience, l’éventualité des autres. À cet âge où tout est féroce et insatisfaisant, je découvris le philosophe de la férocité et de l’insatisfaction: Nietzsche. Stupeur, eurêka ! Il existait donc une synthèse entre la force et la pensée, un droit fondé à la fierté, un emploi légitime de la force. Le libre-arbitre m’apparut aussitôt une conquête réservée à certaines âmes surhumaines, et je n’eus plus d’autre envie à compter de cette heure que celle de conquérir ma surhumanité.